mercredi 24 septembre 2014

Les vacances en solo c'est "paddle la tarte", ou Bob Richard à la mer ...


La rentrée scolaire c'est un peu le moment phare de l'année pour ceux qui ont des enfants.
En fait, pour être exacte, il y a deux mois totalement dingues dès que tu as des mômes : juin, où on te colle toutes les fêtes de l'école, la crèche, la musique, la danse, le judo, le théâtre, les NAP, les TAP, (raye la mention inutile), et septembre, où tu dois justement mettre en place toutes les inscriptions qui te conduiront ... à détester juin ! Et c'est formidable, la boucle est bouclée.
Tous les ans, on frise l'ulcère, et encore moi je n'ai que deux enfants, j'ose pas imaginer la gestion de dingue qu'il faut se fader dans les grosses fratries ...
Alors cette année, quand ma copine M. m'a appelée pour me faire la proposition de ma vie (j'exagère à peine tu commences à me connaître), j'ai bondi de mon siège !
Elle, elle a tout compris.
Tous les ans, elle part juste après la semaine de la rentrée une semaine sur l'Ile de Ré, faire du surf, sans mec et sans minots !
Le-truc-de-dingue !
Et cette année, elle m'a proposé de m'emmener.
J'ai fait semblant d'hésiter deux secondes.
Et puis j'ai sorti mon cerveau de sa boîte pour trouver une organisation tellement béton que mon mec ne pourrait pas décemment refuser de me laisser partir ...
Le projet ensuite était simple : on partait en bagnole toutes les deux, et sur place, on retrouvait un prof de surf qui nous drivait toute la semaine.
Oui tu vas me dire : "Putain du surf quand même ? Je te voyais pas faire ça".
Moi non plus à vrai dire.
J'en ai fait déjà, si si je te jure.
J'en ai fait pour être précise il y a quelques années, un stage de deux heures par jour dans les Charentes, dont je garde l'impression d'un cycle long avec prélavage.
(Je veux dire par là que j'étais comme dans un tambour de machine à laver, et que j'ai bu environ mon poids en eau de mer en trois jours).
Et tout ça pour rester 12 secondes sur la planche et me laisser, à chaque fois, emporter par mon cul (les lois de l'attraction ont toujours eu raison de moi ces salopes).
Bref, j'ai kiffé il est vrai, mais je reconnais quand même que c'est un sport assez ingrat.
Ceci dit, la perspective d'avoir une semaine de vraies vacances, totalement égoïstes (donc sympas), les premières depuis .... hé ben 13 ans quand même, m'ont convaincue que j'étais sans nul doute une championne de surf !
Je lui ai donc glissé que j'étais la candidate idéale.
J'ai omis (pas tout à fait volontairement, nooooooon) de préciser que j'avais peur de tomber, que je ne pouvais même pas mettre ma tête sous l'eau sans boucher mon nez (oui, un peu comme une enfant de 5 ans), et que je ne nageais que la brasse (coulée éventuellement, pour faire style genre).
Elle m'a trouvée formidable.
Elle a dit oui, j'ai dit oui.
Et on est donc parties.
Thelma et Louise.
Enfin Thella et Mouise (et je ne faisais pas Thella bien entendu).
Arrivées sur l'ile de Ré, on a été accueillies par ce constat sauvage et brutal : il n'y avait ... pas de vagues.
Mais genre zéro quoi.
Alors certes, les amateurs de surf vont se marrer et me dire que, de toutes façons, l'île de Ré c'est pas vraiment connu pour être le meilleur spot pour la glisse.
Mais justement, pour moi qui débutait, ça semblait parfait.
Seulement voilà.
Pas de vagues, pas de surf.
Pas de surf, pas de vacances ?
Oh que non, on n'allait pas se laisser abattre comme ça !
On a donc rapidement opté pour le plan B : le paddle.
Le paddle c'est super chouette, même quand il n'y a pas de vagues : tu te déplaces sur cette grande planche en pagayant debout, Estelle Hallyday fait ça très bien apparemment, moi j'étais moins gracieuse mais on s'en foutait un peu étant donné qu'il n'y avait que des retraités sur la plage et que donc choper n'était même pas envisageable (oh ça va je décooooonne).
On a testé le paddle le jour même de notre arrivée et je ne suis tombée que deux fois, en plus à des endroits où j'avais pied.
C'était indiscutablement le paradis.
Toute la semaine qui a suivi, on était malgré tout en étroit contact avec le prof de surf pour savoir s'il y avait assez de vague (au moins une donc) pour tenter une sortie.
Toute la semaine, ma copine M. a mis des cierges à Sainte Rita pour que la mer se décolle un peu le cul et donne autre chose que du clapotis de merde.
Toute la semaine, j'ai soufflé sur ses cierges en priant pour que ça continue comme ça et que je n'aie pas à refaire un cycle "synthétique sans prélavage" ...
Et c'est moi qui ai gagné ;) !
Du coup, on a eu plein de temps pour faire du paddle.
Dès le deuxième jour, elle m'a dit qu'un ami allait nous rejoindre et qu'il pourrait nous apprendre plein de choses.
En effet, le fameux E. vit sur l'île de Ré où il est saunier (c'est à dire qu'il récolte le sel) depuis 30 piges, il était prof de planche à voile et de surf, et accessoirement il navigue sur un paddle depuis que j'ai appris à marcher à peu près.
Je l'attendais donc un peu comme le Messie, comme celui qui allait faire de moi une pro de la pagaie.
(et ça m'aurait changée moi qui suis une pro de la pagaille mouarf mouarf mouarf)(pardon pour le niveau de la vanne)
Lorsqu'il est arrivé, j'ai eu heu ... un choc.
Certes, E. est baraqué, bronzé, souriant, il approche gentiment de la cinquantaine, il a un humour de dingue et une grande culture.
Il est presque parfait en fait.
Il y a juste comment dire ?
Ce léger, ce menu, cet insignifiant petit détail qui m'a un peu déstabilisée : E. a une façon de se vêtir (ou de se dévêtir devrais-je dire) assez atypique.
Le premier jour, il est apparu tel que tu le vois sur la photo : un shorty en lamé or zébré, une vieille ceinture rouge dans laquelle il glisse sa canne à pêche, son paddle au bout du bras, prêt à partir pour des heures sur l'eau.
Tu vas me dire que son look est assez marqué.
Tu auras à la fois raison et tort.
Car les jours suivants, il a repoussé à chaque fois les limites.
On a eu, au jour 2, le shorty en lamé argent.
Pas mal.
Mais moins surprenant.
Je commençais presque à douter de sa réputation dont on avait écho en écoutant les blas-blas sur la plage.
Le jour 3, j'ai quand même été contrainte de fermer ma bouche à son arrivée.
Il arborait un superbe string noir.
Comme il pagaie beaucoup plus vite que moi, j'ai donc eu une vue sur ses fesses durant les deux heures qu'a duré la promenade.
Mais pourquoi tu es restée derrière me demanderas-tu ?
Hé bien je vais t'expliquer : c'était encore plus space de face.
Parce que le string, figure-toi, était affublé d'une fermeture éclair.
Oui, tu visualises bien : un string, donc les fesses à l'air vu de dos, et un zip prêt à laisser sortir son attirail vu de face.
La grande classe.
Evidemment, tout ça le fait beaucoup rire, il est à fond dans la provoc et se régale de la tronche en biais des "gens comme il faut" qu'il croise sur la plage.
Moi je me bidonnais, et avec ma copine M., on pariait pour savoir si il pouvait encore élever le niveau, déjà assez high quand même.
Il a réussi je dois l'admettre.
Le jour 4, après un set de paddle, il a posé sa planche dans le sable pour aller se baigner.
On était déjà dans l'eau avec M., on papotait gentiment en regardant si on ne voyait pas de méduses s'approcher de nos cuisses de nymphes (notre hantise)(les méduses hein, pas nos cuisses).
Quand on a commencé à entendre sa voix, on a tourné la tête vers lui et on l'a vu entrer dans l'eau.
A poil.
Pas en shorty lamé, pas un string zippé, non.
A POIL.
Et là, il s'est approché et a commencé à nous faire la conversation, le plus simplement et le plus naturellement du monde.
Ca a duré environ 30 minutes.
Trente minutes sur lesquelles j'en ai passé au moins 29 à me répéter mentalement cet incroyable mantra : "surtout ne baisse pas les yeux ne regarde pas sa bite, surtout ne baisse pas les yeux ne regarde pas sa bite, surtout ne baisse pas les yeux ne regarde pas sa bite !".
Un vrai travail bouddhiste.
Du coup, toute la semaine, on n'a presque parlé que de ça : avant la plage, après la plage, on avait toujours un commentaire ou un pari à faire, franchement il nous a régalées, c'était trop sympa de sa part !
Je garde par exemple un souvenir ému de cette soirée où il nous a emmenées récolter de la fleur de sel dans son marais, et où je l'ai donc suivi, tandis qu'il se tenait accroupi en string devant la succession de bassins où il testait le profondeur de l'eau ...
J'ai rarement autant ri de ma vie !
Rarement rencontré quelqu'un d'aussi généreux aussi : intéressant, sympa, open minded ...
Finalement un bonheur ce mec-là.
Honnêtement je ne pouvais pas ne pas écrire sur lui, parce que tous les jours, j'avais cette réplique en tête, que je voulais pouvoir écrire pour toi : "Tu t'mets toujours à poil pour citer Saint-John Perse ?".
Toute ma semaine, je n'ai pensé qu'à ça.
Mais il y a autre chose en fait.
Tu te poses sûrement la question je le sais.
Ne fais pas semblant avec moi va.
Rhaaa tu brûles que je te le dises n'est ce pas ?
Si je n'ai tenu que 29 mn sur les 30, est-ce que j'ai baissé les yeux, hein c'est ça ???
Hé bien ... oui !
J'ai craqué.
Et ce que j'ai vu m'a déroutée figure-toi.
Le gars n'avait aucune trace de démarcation du maillot.
Au-cu-ne.
Ni derrière, ni sur les côtés .... ni devant !
Du coup, je n'ai pas pu résister.
Je l'ai rebaptisé.
Comment je l'ai appelé ?
Réfléchis.
Non, pas bite-en-bois voyons !
Je voulais trouver pour lui un nom à sa mesure, un nom de rebelle, un nom de chef indien ...
Et ça m'est venu, ce soir-là, dans le marais, en le voyant récolter la fleur de sel au soleil couchant.
Tu ne trouves pas ?
Tu ne devines pas ?
Moi en le regardant je ne pensais finalement plus qu'à ça !
"La raie dorée de l'île de Ré" !
C'était parfait, c'était magique, c'était ... impeccable !
Nul doute que je ne pourrai pas l'oublier, mais du coup, avec ce surnom, je pense que lui aussi se souviendra de moi ;) !

13 commentaires:

  1. A la hauteur de mes attentes !! :-D
    Chapeau bas ! Je pleure de rire. Après avoir pleuré tout court sur ton post précédent.... T'es clouante, comme fille !

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  2. Je revenais ici parce qu'hier j'ai pas pu laisser un commentaire sur le message précédent... (tu vis dans moi parfois ?)... je suis assez d'accord avec delph ici on passe des larmes ... au rire et putain ça fait un bien fou...
    Je suis censée bosser là.... et je tente de rester digne....
    mais j'ai qu'un mot à dire "Vive la raie dorée de l'Ile de Ré" et dire qu'il y en a qui n'y vont que pour les trucs bobo... les brocantes et les belles maisons (remarque c'est pas mal non plus) mais en vrai le bonheur il est sur la plage ou dans les marais salants... va y avoir foule
    Merci merci Merci

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    1. Voilà, le vrai bonheur est dans les marais :)
      Et merci pour le reste, rire et pleurer c'est juste vivre en fait ...
      Alors vivons, le bon comme le mauvais !

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  3. l'île de Raie, c'est toujours une bonne idée.
    Des baisers
    Des baisés
    Alexandra

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  4. Oh mais enoooorme quoi !! Il me tardait dans savoir plus sur cette raie aperçue sur IG ; ) Je ne pourrai plus jamais prononcer "Île de Ré" sans me marrer, merci Bob !!
    Maëlle
    (Et le cycle long avec prélavage !!!!)

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    1. Oui je me disais quand même que c'était pas sympa de vous laisser sur votre faim ;) !

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  5. OMG quelle horreur ! D'EN savoir plus. Mais la hoooonte
    Maëlle

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  6. C'est marrant, j'ai commencé par trouver ça rigolo, mais à la réflexion, je trouve ça presque agressif de se balader en string ou à poil en dehors de chez soi ... quid des gens qui passent, y compris des enfants, qui n'ont pas nécessairement envie de se retrouver nez à nez avec l'anatomie de E.? Aujourd'hui, je lèverais les yeux au ciel , mais à 12 ans ça m'aurait mise très mal à l'aise.
    Bref, provoc gratuite ou il-est-liiiiibre-max, j'hésite...

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    1. A vrai dire, sur la plage au mois de septembre, il n'y a que des retraités à part moi ;))
      Mais je comprends ton questionnement ...

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  7. "Oui tu vas me dire : "Putain du surf quand même ? Je te voyais pas faire ça"." mais carrément ! je l'ai presque dit à voix haute devant mon écran :-D
    Enorme post, fabuleux, magique !

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    1. Tu veux que je te dise un secret ?
      Je lis dans ton cortex ;))
      Attends toi au pire maintenant hahahaaaa
      bises

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